Portes ouvertes de la Maison de la Semence Grandes-Cultures - septembre 2018

Présentation de la plateforme variétale chez Denis Chaume et des expérimentation sur la ferme d'Armand Duteil et Paula Becker

Publié par Alexandre Merlingeas, journaliste pour Réussir le Périgord & Ségolène Marchal, Equipe biodiversité d'AgroBio Périgord on Friday, October 5, 2018

Pour sa 17ème édition, la rencontre annuelle autour des maïs et tournesols populations a fait peau neuve. Centrée sur les expérimentations menées dans le cadre du CASDAR Covalience, elle a permis aux paysans, animateurs, coopératives, élèves de MFR, élus et journalistes présents de mieux comprendre le travail entrepris sur le terrain par les membres de la Maison de la Semence Paysanne Dordogne avec l’appui des animateurs d’AgroBio Périgord.

Lors de l’inauguration de la journée, Frank Lasjaunias, administrateur d’AgroBio Périgord et référent biodiversité a rappelé l’implication de l’association dans la sauvegarde de la biodiversité dans les champs et le besoin des’appuyer sur des paysans nombreux et impliqués dans cette conservation in-situ. Après avoir accumulé de grandes quantités de connaissances ces 15 dernières années grâce à la plateforme, un nouveau besoin émerge aujourd’hui pour le collectif maïs population, axé sur des expérimentations afin de pouvoir évaluer l’impact de la sélection paysanne.

La matinée a été consacrée à la visite de la vitrine, semée chez Denis Chaume, au GAEC de chez Buisson à Mareuil. Denis accueille pour la première année la vitrine sur sa ferme, comme pour célébrer l’anniversaire de ses débuts dans le maïs population. Il cultive en effet depuis 10 ans du maïs population destiné à l’ensilage sur 14 Ha. Sur la vitrine, une vingtaine de variétés de maïs populations et quelques tournesols et sorghos ont été présentés par les paysans qui les cultivent chez eux, racontant les anecdotes et les expériences qu’ils connaissent sur ces variétés. Porteurs de projet et autres personnes intéressées par les semences paysannes ont ainsi observé les différences dans la morphologie de la plante et de l’épi ainsi que dans ses valeurs nutritionnelles. Chacun a pu se faire une idée de ce qui peut être adapté à tel ou tel usage, selon la capacité de la plante à être valorisée en grain, en alimentation humaine ou en ensilage.

Le groupe s’est ensuite dirigé vers Léguillac-de-Cercles, où le café associatif créé il y a 8 ans lui ouvrait ses portes. L’occasion pendant l’apéritif de visionner un film monté par un autre collectif du groupe national maïs population, l’ADDEAR 42, autour de ses chantiers tri-égrainage. L’ADDEAR 42 accueillait 15 jours plus tôt, dans la Loire, les 3èmes Rencontres Nationales du groupe Maïs Population.

Pour le déjeuner, Aurélie Bénazet du Collectif Les Pieds dans le Plat a régalé les participants de ses recettes à base de maïs population. Croûtons de maïs dans une soupe de potimarron, tartinades sur du pain au maïs, polenta et tendrons de veau, crème au chocolat et gâteau à la farine de maïs, les plats étaient multiples et leur ont ouvert la large palette de saveurs permises par le maïs population.

Cet article de belle qualité paru dans Réussir le Périgord présente le programme de l’après midi de la journée et met à l’honneur la ferme d’Armand et Paula, qui s’investissent tous deux dans le programme depuis belle lurette!

“La ferme biologique d’Armand Duteil et Paula Becker a accueilli du monde, le 27 septembre, dans le cadre de la rencontre annuelle du programme sur les variétés paysannes de maïs et tournesol organisée par AgroBio Périgord. La matinée s’est déroulée au Gaec de Chez Buisson, à Mareuil-sur-Belle, pour y découvrir la vitrine d’essais menés sur une parcelle contenant une vingtaine de variétés de maïs population, tournesol et sorgho. Puis une soixante de personne a participé au repas à base de maïs paysan, au café associatif de Léguillac-de-Cercles, avant de rallier, l’après-midi, la ferme de Bourdeilles.

Paula et Armand

Figure 1: Paula et Armand

Les élèves de la classe de seconde professionnelle “Conduite et gestion des entreprises agricoles” et leur formateur en agronomie, Bertrand Eytier, les y ont rejoints. Labellisée ferme pédagogique en 2014, l’exploitation de la Bertinie est habituée à recevoir des enfants et des étudiants. “J’ai travaillé comme documentaliste dans des établissements scolaires. Je souhaitais proposer ce volet pédagogique sur la ferme pour montrer ce que l’on fait. On accueille des enfants de classe maternelle, primaire, des collèges et des centres de loisirs. Mais aussi, des élèves de MFR, du lycée agricole de Coulounieix-Chamiers ou des personnes en formation adulte. Cela représente une quinzaine de groupes par an”, a expliqué Paula Becker.

Face à ce public hétérogène, Armand Duteil a présenté l’exploitation en polyculture élevage et maraîchage, avec une quinzaine de mères limousines, convertie en bio en 2010. Elle comprend 55ha, dont 25 ha de céréales, maïs population, blé ancien et féveroles, mais aussi des prairies, 1 ha de maraîchage et quelques petits vergers de noix et de pommes. “Nous faisons 80% de vente directe avec des marchés. Nous vendons la viande en caissettes et transformons des céréales en farine avec un moulin de type astrié à meule de pierre”, a-t-il détaillé. Une fois les présentations faites, la journée a pris un tour nettement plus technique avec la visite des expérimentations menées dans le cadre du programme “Cultivons la biodiversité en Nouvelle-Aquitaine” (Casdar Covalience et Diversifood). Ce dispositif implique neuf fermes du département sur le thème du maïs population. Il s’agit de tester des méthodes de sélection.

Armand Duteil présentant les principes de la sélection massale

Figure 2: Armand Duteil présentant les principes de la sélection massale

Le premier essai mené porte sur l’épi-ligne en variété Lavergne. Il consiste à semer cinquante pieds avec les grains d’un même épi dans plusieurs lignes afin de “contrôler” la descendance. La sélection massale consiste à choisir les meilleures plantes parmi une population de maïs. Mais la qualité d’une plante est à la fois le résultat de sa génétique et de l’environnement, ce qui peut engendrer des erreurs dans la sélection. Par ailleurs, la génétique étant le moyenne entre celle de la mère et du père, elle peut aussi être variable et trompeuse. Robin Noël et Lucile Bensarsa d’AgroBio ont pu expliquer la mise en place de cet essai, dont les deux objectifs sont à la fois de sélectionner mais aussi d’étudier la génétique. “On a beaucoup de publication sur le caractère des maïs hybrides mais zéro référence sur l’héritabilité des caractères en maïs population”, a précisé Robin Noël.

Lucile Bensarsa et Robin Noël présentant l'expérimentation dite de l'épi-ligne

Figure 3: Lucile Bensarsa et Robin Noël présentant l’expérimentation dite de l’épi-ligne

L’autre essai consiste à rassembler les plus gros épis pour créer une variété population avec un bon potentiel de rendement. Comme l’a rappelé Jérôme Dury, technicien chez AgroBio Périgord: “Des fermes ne vont pas vers le maïs population car ils ne sont pas assurés d’avoir assez de rendement, notamment des élevages laitiers. Il ne faut pas que ce soit un tabou sans être non plus un Graal”. L’essai a aussi pour objectif d’élaborer une méthode de sélection plus performante qu’on puisse appliquer à d’autres thématiques." Alexandre Merlingeas